• Je me réveille en sursaut. Je suis essoufflée. Des goûtes de sueurs coulent sur mon visage. J'essaie de me calmer, ce qui n'est pas une chose facile. Puis, je réalise que je viens de faire un énième cauchemar. Je soupire une fois que j'ai récupéré une respiration à peu près normale. Je m'assois sur le bord du lit et je regarde dans le vague avant de fermer les yeux. Même si je ne me suis pas beaucoup réveillée durant la nuit, j'ai l'impression d'être fatiguée comme si j'avais passé une nuit blanche. Et ça, à cause de nombreux cauchemars. Me laisseront-ils jamais tranquille ? Pourquoi m'est-il impossible d'oublier ? C'est bien la question que je me pose souvent. Trop souvent. Je me décide enfin à me lever. Je me dirige d'un pas lent vers la salle de bain pour prendre une douche bien froide, comme j'en ai l'habitude. Je sors rapidement de la cabine. J'enfile un simple jean, un tee-shirt rouge avec un gilet blanc. Je vais ensuite dans la partie cuisine de la pièce principale et je me prépare mon habituel café, après avoir allumé la radio. Comme hier, je ne fais pas attention. Enfin, jusqu'au moment où on annonce un nouveau meurtre...

    « Un nouvel assassinat a eu lieu cette nuit au même endroit ! Une femme, d'une vingtaine d'année, a été tué de la même manière que celle de la nuit précédente, c'est à dire égorgée. Sauf que cette fois-ci, le meurtrier a laissé un message à côté du corps de la victime. L'agent Noah Vitmann, chargé de l'enquête, est entrain de se rendre au domicile de la jeune femme... » 

    Encore une innocente qui a été victime d'un fou qui a envie de répandre le malheur partout où il passe. Je soupire, en étant désolée pour la famille, et continue la préparation de mon café du matin. Mais au moment où je prends ma tasse, quelqu'un frappe brusquement contre la porte de la chambre de motel. Ce qui me surprend et je lâche l'objet qui se brise sur le sol, en répandant son contenu. Je laisse échapper un juron et crie à l'intention de l'invité surprise, ne cachant pas ma mauvaise humeur : 

    -ENTREZ ! 

    La porte s'ouvre et il m'est impossible de ne pas de reconnaître le visiteur. Je soupire. 

    -Encore vous. 
    -Je dois vous parler. M'informe ce crétin d'agent de police d'un ton sérieux et grave. 
    -Asseyez-vous et attendez que je nettoie ce que j'ai fait tomber au moment où vous avez frapper à la porte. Lui dis-je avec un ton rempli de reproche.

    Il s'exécute et attend que j'ai fini de nettoyer tout le café répandu sur le carrelage et j'ai jeté les morceaux de ce qui était il y a encore quelques minutes une tasse. Une fois que j'ai terminé, je suis allée le rejoindre à table. Son regard vert est aussi grave que le ton qu'il avait employé il y a quelques minutes. Je fronce les sourcils, intriguée. 

    -Vous avez dû entendre parler du meurtre de cette nuit... 
    -J'étais avec vous ! Me défendis-je immédiatement. Alors je ne peux pas être le coupable ! 
    -Ce n'est pas pour ça que je suis venu. Vous avez été innocentée, ne vous inquiétez pas. 
    -C'est pour quoi alors ? 
    -Vous avez écouter les informations ce matin ? 
    -Vite fait.
    -Vous savez donc que l'assassin a laissé un message près du corps de la victime. Message qu'il a écrit avec le sang de cette femme. 
    -En quoi cela me concerne ? Commençai-je à m'impatienter. 
    -Le message disait : « Je t'aurai Tania Garyl ». M'annonce-t-il en me montrant une photo de la scène du crime, où je peux voir le message laissé en gros plan. 

    Je me raidis dès que j'entends cette phrase. Mes mains se crispent sur la photographie. Je la repose très lentement sur la table. Je doute que l'abîmer ou la chiffonner soit une bonne idée. Mais à vrai dire, j'ai d'autre soucis qu'une simple image. Ce que je craignais est arrivé. Il a enfin réussi à me rattraper. Et il sait sans doute où je réside. J'aurais dû m'en douter, j'aurais dû. Cette façon, si particulière, qu'il a d'égorger ces deux femmes. Cette façon dont il laisse les corps gisant dans leur propre sang. Le fait qu'il n'a assassiné que des femmes, pour le moment. Tous ces indices auraient dû me mettre sur la voie, dès la première victime. Il faut absolument que je quitte cette ville. Absolument. Certes, je veux mourir, je veux être débarrassée de mon enfer. Mais je ne veux pas que ce soit lui qui me délivre. Non, je ne veux pas. Depuis tant de temps, je passe va vie à le fuir, à l'éviter, mais rien n'y fait. Il me poursuit. Il me traque. Je suis quelqu'un de gênant pour lui. De très gênant même. Puis, en repensant à lui, un flot de souvenirs douloureux défile sous mes yeux. Mon cœur se serre. Il faut que je me retrouve seule. Il faut que cet agent de police, qui me regarde d'un œil inquiet, parte. Oui, il le faut. Maintenant ! 

    -Sortez. Dis-je soudain, encore sous le choc de l'information. 
    -Mais... 
    -SORTEZ ! Hurlai-je, pour qu'il comprenne, que je veux être seule. 

    Il n'insiste pas, à mon grand soulagement. Il sort un papier de la poche de sa veste, ainsi qu'un stylo et note quelque chose.

    -Si vous avez un quelconque problème, appelez moi. Me dit-il, une fois qu'il a fini d'écrire et en me tendant la feuille. Vous n'êtes plus considérée comme un suspect, comme une future victime. Vous allez donc, bénéficier de la protection de la police. Je reviendrai vous voir pour vous poser quelques questions. J'ai bien l'impression que vous savez plus de chose sur ce meurtrier qu'on ne peut le penser. 
    -Votre protection à la noix ne changera rien, l'informai-je, d'un ton légèrement froid et sans le regarder. Sortez maintenant. 

    Il ne rajoute rien et sort. Une fois que la porte s'est refermée derrière lui, je prends le morceau de papier pour voir ce qu'il y avait écrit dessus. Il y avait son nom, Noah Vitmann, suivit d'un numéro de téléphone portable. Je le repose sur la table et je me lève. Je me plante devant la fenêtre et mets mes mains sur mon visage. Je respire un grand coup. Il est ici, quelque part dans cette ville. Et le fait qu'il risque d'attaquer n'importe quand me paralyse de peur. Des images défilent devant mes yeux. Des images de mon ancienne vie, de mes proches, de tous ceux que j'aimais et que j'aime toujours d'ailleurs. Une envie irrésistible de sortir me prend soudain. Je me précipite vers l'extérieur de la chambre et du motel, sans avoir mis quelque chose sur le dos, et je cours. Je cours sur les trottoirs. Je cours droit devant moi. Je ne prête aucune attention à quiconque. Je bouscule sans doute des gens sans faire attention. Pourtant, je ne distingue pas de protestation. Ma détresse se voit-elle autant que ça sur mon visage ? Ce serait donc des larmes que je sens couler sur mes joues ? A vrai dire, je ne fais plus attention à quoique ce soit. Je me contente de courir, jusqu'à ce que mes jambes me disent stop, qu'elles n'en peuvent plus. En peu de temps, je commence à avoir du mal à respirer. Soudain, je m'écroule à genoux sur le sol. J'ai dû quitter la ville, car je ne vois aucune maison, ni rien de construit d'ailleurs. C'est tout ce que je peux dire, ma vision étant floue à cause des larmes. Je laisse mon chagrin et ma douleur, longtemps contenus, prendre possession de moi. Tous les souvenirs, aussi bien heureux que malheureux ressurgissent en moi. Je revois ma mère m'apprendre à jouer du piano, mon père me sauvant de la noyade quand j'avais 5 ans. Je revois aussi mon grand-père me prendre dans ses bras pour me consoler après la mort de ma mère, et après la mort de mon père. Je revois mon frère jumeau qui a toujours été là et qui a toujours su me comprendre, sans doute grâce au lien qui nous unissait. Et je revois aussi tous mes amis, notamment Aurélie. Ils me manquent tous. J'ai mal au fond de moi. Une douleur impossible à définir est présente en moi, ainsi qu'un immense vide. 
    Je me souviens parfaitement de mon frère, Jonathan. Il était aussi brun que moi mais à la différence de moi, il avait hérité des yeux marron foncé de notre père. Lui et moi, nous étions soudés. Il savait quand j'allais mal, je savais quand c'était le cas pour lui. Il a toujours été là pour moi. Toujours. A ses yeux, j'étais plus importante que n'importe qui d'autre. Il me l'a dit, juste avant de disparaître dans mes bras. J'éclate à nouveau en sanglot en repensant à lui. Il est sans doute la personne qui me manque le plus, dont l'absence m'est encore plus douloureuse. C'était mon frère, celui avec qui j'ai tout partagé. Il me manque terriblement. J'aimerai tant qu'il soit là, avec moi. S'il était là, il me prendrait dans ses bras et me bercerait jusqu'à que je me calme. Mais là, je suis seule, terriblement seule. Je suis seule sur cette plaine. Je suis seule dans ma vie. Je n'ai personne, strictement personne. Tout m'a été enlevé. Tout. Je n'ai plus rien. Plus rien du tout. Pourquoi a-t-il fallu que cela m'arrive à moi ? Pourquoi faut-il que je souffre autant ? Pourquoi m'avoir tout pris ? Pourquoi suis-je si seule ? Pourquoi je n'arrive pas à tourner la page ? Pourquoi je n'arrive pas à oublier ? Pourquoi ? Mais pourquoi ? 
    J'aimerais tant mourir, que ce calvaire se termine enfin. Je voudrais avoir le courage de me lever et de sauter de la falaise qui est devant moi. Pourquoi n'ai-je pas ce courage ? Pourquoi faut-il que je continue de vivre dans cette souffrance que je dois subir chaque jour, chaque nuit, chaque heure, chaque minute, chaque seconde ? Pourquoi ne puis-je pas connaître la paix intérieure ? Pourquoi ne puis-je pas connaître le bonheur ? Pourquoi dois-je souffrir autant ? Quel est le but de tout ça ? Qu'est-ce que j'ai bien pu faire dans ma vie pour mériter tout ça ? Pourquoi je n'arrive pas à me relever et d'aller de l'avant ? Pourquoi je n'arrive pas à affronter mes vieux démons ? Pourquoi je n'arrive pas à accepter une quelconque aide ? Pourquoi je m'enfonce dans une solitude qui me déchire de jour en jour ? Pourquoi suis-je aussi désespérée ? Pourquoi tant de désespoir ?

     Pourquoi ? Mais pourquoi ? Pitié, que quelqu'un me libère de cette souffrance !


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  • La nuit ne va pas tarder à tomber. Quant à moi, j'avance dans les rues d'un pas déterminé. Je sais où je vais, et je sais ce que je veux faire. Je me rends chez Tania... Du moins, dans le motel où elle réside. Je veux des réponses. Elle est si... si mystérieuse. Elle cache tellement de choses que s'en est presque effrayant. Pourtant, l'image de son visage quand je lui ai dit le message qu'avait laissé le meurtrier ne cesse de me revenir en mémoire. Elle avait l'air surprise, au début. Puis la surprise a laissé place à la frayeur. Oui, c'est ça. Elle était tétanisée. Qui ne le serait pas en apprenant que quelqu'un veut sa peau ? Sauf que, j'ai bien l'impression qu'elle connaît ce type, et qu'elle en a peur. Peut être est-ce à cause de lui que j'arrive à lire dans son regard bleu océan une grande tristesse. Peut-être a-t-elle déjà eu affaire à lui dans le passé. Peut être qu'elle a été témoin de quelque chose. Ce qui expliquerait pourquoi il veut sa mort. Cela expliquerait bien des choses d'ailleurs. Je ne sais pas comment elle va réagir quand je vais arriver pour l'interroger. Mal je suppose, la connaissant. Mais je commence à penser que cette froideur qu'elle affiche volontairement n'est qu'une façon de se protéger. Une sorte de carapace qu'elle se serait forgée avec le temps pour éviter de montrer ce qu'elle ressent au fond d'elle-même. Mais, comme on le dit souvent, le regard ne trompe pas. Tout le chagrin qui est en elle se reflète dans ses yeux. Je l'ai remarqué dès que je l'ai rencontrée. A ce moment-là, j'ai su qu'elle ne pouvait être l'assassin, mais je devais faire mon travail. Je ne peux pas juger à partir d'une intuition. Je veux en savoir plus sur elle. Elle m'intrigue. Mais elle me fait de la peine aussi. J'aimerai tellement percer son secret, pour pouvoir enfin l'aider. Parce qu'elle a besoin d'aide, je le sais au plus profond de moi. Je sais que ce ne sera pas facile, mais je n'abandonnerai pas. Je me souviens aussi comment ses mains se sont crispées autour de la tasse quand je lui ai demandé pourquoi elle n'était pas auprès de ses proches, quand elle était chez moi. J'ai dû mettre le doigt sur un sujet sensible, involontairement bien sûr. Si je veux réussir à la mettre en confiance, il va falloir que j'agisse avec plus de tact, et surtout, avec beaucoup de patience.
    Au bout de quelques minutes de marche, j'arrive enfin au motel. Ce bâtiment n'est pas du tout en bon état. Je ne suis pas sûr que les services d'hygiène approuvent ce lieu. Je me demande bien comment des personnes peuvent séjourner ici, même pour une seule nuit. Je mets mon dégoût envers ce tas de béton de côté et j'entre. Je monte les étages pour arriver à celui où il y a la chambre de Tania. Une fois arrivé devant sa porte, je frappe et j'attends. Mais rien. Je frappe à nouveau, mais toujours rien. Je constate que ce n'est pas fermé à clé et je décide d'entrer. Je m'aperçois rapidement qu'elle n'est pas dans cette pièce. Je ferme soigneusement la porte. Je m'avance dans la pièce et soudain, quelque chose attire mon regard et mon attention. Je m'approche de la table où deux photographies sont posées dessus. Je prends la première dans une main et je l'observe. Elle avait été prise en hiver, sans aucun doute là dessus, à cause de toute cette neige. Un bonhomme de neige était derrière quatre personnes : deux adultes et deux enfants qui devaient avoir à peu près le même âge. La femme avait des cheveux blonds et de magnifiques yeux bleus. Son visage ne reflétait que bonheur et joie de vivre. Bizarrement, elle me rappelait quelqu'un par la forme de son visage et ses yeux. L'homme avait des cheveux bruns et des yeux marrons foncés. Lui aussi souriait et il tenait tendrement la main de celle qui était peut être sa femme. Et sans doute que les deux petits étaient leurs enfants. La fille avait des cheveux châtains et des yeux bleus, quoique un peu plus foncés par rapport à ceux de sa mère. Elle devait avoir à peu près 5 ans et son visage montrait toute l'innocence que l'on peut avoir à cet âge. Le garçon, qui ne devait pas être plus vieux que la fillette, avait la même couleur de cheveux que sa sœur, mais lui, avait les yeux marrons de son père. Ils avaient l'air de formé la parfaite petite famille. Ils avaient l'air parfaitement heureux et unis.
    Sans poser cette photo, je prends la deuxième. Changement de décor cette fois-ci. La scène a dû se passer au le printemps, à cause de l'arbre en fleur que je vois en arrière plan. Mais cette fois-ci, il n'y avait pas quatre personne, mais trois, un homme et deux adolescents qui devait avoir approximativement 15ans. L'homme ressemblait beaucoup à celui de la photo précédente, mais avec quelques années de plus et moins bien rasé. Il tenait chaleureusement les deux adolescents par les épaules. L'adolescente avait des yeux bleu océan et des cheveux bruns coupé à la garçonne. Elle me rappelle étrangement quelqu'un. Elle affichait un léger sourire. A coté d'elle, l'adolescent avait les même cheveux bruns qu'elle mais lui, avait les yeux marrons foncé. Je n'ai pas besoin de réfléchir davantage pour deviner qu'il s'agit de la même famille quelques années plus tard et sans la mère. Où est-elle d'ailleurs ? Etait-ce elle qui prenait la photo ? Ou était-elle divorcé avec le père ? Ou bien c'était quelque chose de plus grave...

    -Qu'est-ce que vous faites ici ? Et que faites-vous avec mes photos dans vos mains ? Vous fouillez dans mes affaires maintenant ? Me questionne soudain une voix féminine et familière, dont l'agacement s'entend parfaitement.

    Je sursaute et je me retourne, toujours avec les deux photographies dans les mains. Elle était là, en face de moi. Elle me regardait d'un air sévère. Ses bras sont croisés contre sa poitrine. Ses cheveux bruns sont attachés en queue de cheval. Elle porte un manteau à l'apparence plus chaude que la veste qu'elle portait hier. Et puis soudain, je comprends pourquoi le visage de l'adolescente mon rappelait quelqu'un. Cette jeune fille et la fillette n'était qu'autre que Tania. Avec elle, il y avait son frère, son père et sa mère pour la première photo. Immédiatement, des questions germent dans mon esprit. Question que je me presse de poser.

    -Ce sont des personnes de votre famille sur ces photos ? Demandai-je. Où sont-ils ? Pourquoi n'êtes-vous pas avec eux ? Est-ce que cela à un rapport avec le meurtrier que je cherche ?
    -Ce ne sont pas vos affaires ! Rendez-les moi !

    Sans attendre, je m'exécute. Mais je remarque qu'à côté d'elle, il y a des sacs de voyage remplis. Je fronce les sourcils et mon regard se pose à nouveau sur elle.

    -Pourquoi avez-vous fait vos valises ?
    -Je m'en vais ! Je suis restée suffisamment ici ! Me répond-t-elle, agacée.
    -Mais vous ne pouvez pas partir ! Répliquai-je.
    -Et pourquoi ça ?
    -Parce que fuir ne vous servira à rien.
    -Je ne fuis pas ! Nie-t-elle.
    -Vous fuiez le meurtrier c'est ça ? Commencai-je à comprendre.
    -Je ne fuis personne ! Ah si ! Peut être vous ! Vous et votre manie de vous mêlez de ce qui ne vous regarde pas !
    -Je cherche à vous aider.
    -Je n'ai pas besoin d'aide ! S'écrie-t-elle. Et même si j'en avais besoin, ce n'est pas à vous que j'irai m'adresser !
    -A qui alors ? A en voir votre mode de vie, vous bougez tout le temps pour fuir quelque chose ou plutôt quelqu'un je pense. Vous êtes enfermée dans votre solitude. Vous n'avez personne avec vous.

    Elle ne répond pas. Je pense qu'elle sait que j'ai raison. Son regard fuit le mien et à un moment, il se pose sur les photos. Un soupir s'échappe de ses lèvres. Je m'approche doucement d'elle. Je penche mon visage pour essayer de voir le sien, surtout l'expression qu'elle peut afficher. Je finis par rompre le silence pesant qui s'est installé.

    -Tania, restez, s'il vous plait. J'ignore ce qui vous est arrivée et le rapport entre vous et le meurtrier, mais il est sans doute temps d'affronter les futurs événements.
    -Sauf que je ne peux pas rester. Dit-elle sans lever le regard.
    -Pourquoi ?
    -Parce que je dois partir ce soir. Le gérant du motel veut que je m'en aille, pour pouvoir donner la chambre à quelqu'un d'autre. Il faut que je parte.
    -J'ai une chambre d'amie chez moi. Je peux très bien vous loger le temps que tout soit réglé. Et au moins, je serai sûr que vous n'avez rien.
    -Mais...
    -S'il vous plait acceptez. Insistai-je. Je veux vraiment vous aider. J'arrive à lire une très grande tristesse dans vos yeux et j'aimerai bien comprendre pourquoi elle est là.
    -Je veux bien. Soupire-t-elle. Mais ne croyez pas que je vous dirai quoique ce soit sur moi !
    -Je ne me fais pas d'illusion non plus.

    Je l'aide à finir d'emballer ses affaires puis, nous sortons de la chambre. Une fois à l'extérieur, nous rangeons les affaires de Tania dans le coffre de sa voiture et je monte du côté passager et elle du côté conducteur. Elle démarre le véhicule et nous nous éloignons du motel. Je lui indique par quelle rue passer pour arriver chez moi. Quelques minutes plus tard, nous arrivons devant ma maison et je l'aide à sortir ses affaires, puis à les monter dans la chambre d'amie. Elle ne dit rien. Son regard est vague. Je me demande bien à quoi elle peut bien penser. Je veux l'aider à s'installer, mais elle refuse mon aide, en disant qu'elle peut bien se débrouiller et que, en plus, elle veut rester seule un moment. Je n'insiste pas et je sors. Je descends au rez-de-chaussée et je me laisse tomber dans le canapé. Je mets ma tête entre mes mains, mes coudes prenant appui sur mes cuisses. Je sais qu'il va falloir que j'explique à mes collègues le pourquoi du comment pour le fait qu'une future victime se trouve chez moi, mais à vrai dire, ce n'est pas ça qui me pose spécialement problème mais un de mes collègues, Jeffrey, qui est aussi un ami de longue date. Nous nous sommes connus pendant nos études. Depuis, nous nous entraidons, nous partageons nos informations sur nos enquêtes en cours. Et il était là quand ma femme m'a quitté, parce que j'étais trop pris par mon travail. Et je pense connaître sa réaction quand il apprendra que j'héberge Tania. Il va falloir que je m'arme de patience pour lui expliquer que c'est seulement pour l'aider et éviter qu'elle se fasse tuer que je fais cela. Je le connais, il serait capable de s'imaginer n'importe quoi.
    Sinon, je me demande sans cesse ce qui a bien pu arriver à cette femme pour qu'elle soit aussi... tourmentée. Et encore, je pense que le mot est trop faible pour définir ce qu'elle peut bien ressentir. Je sais qu'elle ne se confiera pas facilement à moi, mais je serai patient. Je sais que dès qu'elle m'aura tout dit, j'arriverai à l'aider. Du moins je l'espère. Mais personne ne mérite d'être aussi malheureuse. Quelles embûches la vie a bien pu lui mettre sur sa route ? Pourquoi n'arrive-t-elle pas à les surmonter ? Est-ce si grave et si douloureux que ça en a l'air ? Quels secrets peut-elle bien cacher ?

    Mais je promets, que pour n'importe quel problème qu'elle a eu, je l'aiderai.

     


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  • Je suis seule dans la chambre , allongée sur le lit les yeux rivés sur le plafond. J'ai fini de ranger mes affaires depuis un moment mais je ne veux pas sortir de cette pièce. Je ne veux pas affronter mon hôte, je préfère m'isoler. Je ne sais pas encore si je vais montrer le bout de mon nez durant le reste de la soirée. Je pense que non. Du moins, je verrai bien. Je ne cesse de me demander pourquoi j'ai accepté de rester ici, alors que mon but, c'est de partir avant qu'une éventuelle rencontre ne se produise. Il va bien falloir que je parte, ou du moins que j'en trouve le courage. Et surtout, avant que je le revois. Je soupire. Je prends dans mes mains une des deux photos que Noah avait trouvé sur la table, celle qui a été prise en hiver, plus précisément le lendemain de Noël, bien que cela ne se voit pas sur la photographie. Mes parents nous avaient emmenés, mon frère et moi, dans un parc. Nous avions fait un bonhomme de neige. Ma mère adorait prendre des photos, pour garder en souvenir des images de ses enfants encore petit. Mon père avait demandé à un passant de nous prendre en photo. Cette personne avait gentiment accepté. A cet époque nous formions une belle famille. Ma mère était psychologue et pendant son temps libre elle s'occupait de ses enfants et jouait du piano. J'adorais comment elle jouait et je lui avais demander de m'apprendre. Mais j'ai juste eu le temps d'apprendre les bases. Parce que, au printemps, elle est morte, le jour de mes 6ans. Je soupire à nouveau. Je prends l'autre photo, qui a été prise pendant les vacances de Pâques, dans l'année de mes 15ans. Mon père, mon frère et moi étions partis pour nous éloigner un peu de la ville. Nous nous baladions souvent dans les étroites rues et nous nous détendions. J'ai oublié le nom de ce petit village, mais c'était l'endroit idéale pour décompresser. Les gens étaient très sympathiques et accueillants. Mais malheureusement, repenser à tout ça me remet aussi en mémoire la mort de mon père, le jour de mes 16ans (et aussi les 16ans de mon frère). Qu'est-ce qu'ils ont mes parents à mourir le jour de mon anniversaire ? Je sais bien que ce n'est pas de leur faute, pas du tout. Qu'ils n'ont rien demandé, qu'ils auraient préféré rester en vie avec moi et mon frère. Je me souviendrai toujours de ce passage de ma vie. J'étais restée des jours et des jours, enfermée dans ma chambre chez ma tante –qui était la sœur aînée de ma mère, juste pour préciser- à pleurer toutes les larmes de mon corps. Je ne laissais entrer personne. Ni ma tante, ni ma cousine Lise (que je considérais comme ma sœur tellement que nous étions proches), ni mon frère, ni mon grand-père (à la suite de la mort de ma grand-mère et comme il détestait la solitude, ma tante qui était sa fille avait accepté de l'héberger). Mais un jour, celui que j'appelais des fois, pour plaisanter bien sûr, l'ancêtre avait eu la brillante idée de faire changer les serrures. Il est donc entré dans la chambre et nous avons parlé. Et ça m'a beaucoup aidé. Une semaine après, je suis retournée en cours. Bizarrement, pendant un temps, tout le monde se montrait gentil et compatissant avec moi, même les personnes qui ne pouvaient pas me voir en peinture. Et ce phénomène c'était aussi produit du côté de mon frère. A mon avis, les professeurs y étaient pour quelque chose. J'ai même eu le droit à une « super » conversation avec mon professeur principal, qui me disait que je pouvais lui parler si j'en ressentais le besoin. J'ai souvent entendu ce genre de discours par tous les adultes que j'ai croisé sur mon chemin dans les jours qui ont suivi mon retour au collège. Pensaient-ils que je n'avais aucun ami ? Ce qui ai bien sûr faux. Et si j'avais besoin de parler, soit c'était avec mon frère, soit avec Aurélie ou encore avec mon meilleur ami Benji. Il habitait non loin de chez moi, enfin, avant la mort de mon père. Benji était un peu unique on va dire. Il n'était pas comme les autres garçons de cet âge là, qui passent leur temps à se croire les plus beaux et les plus forts. Non, lui, il était du genre timide et réservé, qui se fichait de son look autant que sa première couche. Il avait des cheveux bruns avec des yeux noirs. Il jouait merveilleusement bien de la guitare et aussi, il composait des chansons quand il avait des heures à tuer. Ses chansons étaient magnifiques et avec Aurélie, nous lui demandions souvent d'où il trouvait toutes ses idées. Il se contentait de répondre qu'il avait une muse bien à lui, qui ne cessait de l'inspirer. Et à chaque fois, pendant les cours de maths, ma chère meilleure amie n'arrêtait pas de me dire que c'était moi, sa muse, pour la simple raison qu'il avait béguin pour moi. Je ne l'ai pas cru pendant un long moment, bien que ses dires étaient parfaitement justes. Sauf que, le mot « béguin » était bien trop faible pour dire ce qu'il ressentait. Non, il était amoureux, mais vraiment amoureux, de moi. Mais à ce moment-là, je ne le savais pas. 
    Je fouille un peu dans mes affaires pour retrouver une photo où j'étais avec Aurélie et sa tignasse plus bouclée que d'habitude qui lui en faisait voir de toutes les couleurs, et Benji. J'étais au milieu, Aurélie à ma droite et Benji à ma gauche. Nous étions devant le lycée. Nous étions vêtus de gros manteaux, de grosses écharpes et, dans mon cas, d'un bonnet marron et rouge. Je me souviens que, malgré la fin de l'hiver, il faisant encore un froid de canard. Mes deux amis et moi avions choisi le même enseignement de détermination au lycée et nous avions eu la chance d'être dans la même classe. Nous passions tout notre temps ensemble et nous nous entraidions pour faire les devoirs. Nous mettions parfois deux heures à les faire, même si nous n'avions pas grand chose. C'est juste que nous avions du mal à nous concentrer à cause des fous rires provoqués par Aurélie. Mais elle n'en provoquait pas forcément à l'extérieur des cours mais aussi pendant les cours. Surtout pendant les cours de sport. Nous n'étions pas du tout sportifs et quand nous nous entraînions au basket ou au volley-ball, Aurélie avait une fâcheuse tendance à viser le pauvre professeur qui avait bien du mal à éviter les projectiles d'une de ses élèves. Quand la balle était petite, comme une balle de tennis de table, ça allait. Mais quand il s'agissait d'un ballon de volley, là, par contre, ce n'est plus du tout la même histoire. Elle ne le faisait pas exprès, mais quand le professeur lui disait de faire attention, Benji et moi avions beaucoup de mal à garder notre sérieux. Surtout quand nous voyions le commentaire du professeur sur son bulletin. Je ne me souviens plus des termes exacts qu'il utilisait mais en gros, il disait qu'il fallait qu'elle prenne de sérieux cours pour qu'elle apprenne à viser et aussi qu'il y avait un besoin urgent qu'elle aille consulter pour ses yeux, parce qu'il n'avait pas de cible dessiner sur son front. Il faisait partie des rares professeurs a être doté d'humour. Ce qui n'était pas le cas de notre professeur principal qui n'arrêtait pas de nous demander de nous calmer après qu'elle ait rendu les bulletins. 
    Je remarque que j'arrive à me souvenir de plein de choses avec juste une simple photographie. Je soupire et je me laisse tomber sur le lit. Il faut vraiment que je m'en aille d'ici. Il faut que je parte. Je ne peux pas rester. Non, je ne peux pas. Mon passé me rattrape et il faut absolument que je le fuis. Bien qu'il soit dans la ville où je me trouve, ça ne veut pas forcément dire qu'il m'a retrouvée. Mouais ... C'est comme croire au Père Noël ce que je viens de dire. Sans vraiment m'en rendre compte, je finis par m'endormir. Une nuit remplie de cauchemars m'attend encore une fois. En serai-je, un jour, débarrassée ? Je doute, sincèrement, je doute. Je suis destinée à vivre dans la souffrance que me procure mon douloureux passé. Le jour s'est levé. Mes yeux bleus s'ouvrent tout doucement. Je mets quelques secondes à réaliser que je ne suis pas dans un certain motel miteux, mais dans une maison confortable et que mon hôte n'est qu'autre que l'agent Vitmann. Je soupire et je me redresse. Je remarque que je ne suis pas sur les couvertures, mais dans les couvertures. Et je n'avais même pas défait le lit la veille. Une hypothèse germe rapidement dans mon esprit. Noah serait sans doute monté hier, inquiet de ne pas me voir sortir de la chambre et il m'aurait vu entrain de dormir. Il m'aurait donc mis sous les couvertures. C'est sans doute ça. Je me lève et je mets quelques minutes à trouver la salle de bain. Comme d'habitude, je prends une douche froide pour me réveiller et essayer de penser à autre chose qu'à mes terribles cauchemars. Plus tard, une fois vêtue d'un simple jean, d'un pull mauve et d'un gilet violet, je descends les escaliers pour me diriger vers la cuisine. Sur la table, je trouve un message, de la part de mon hôte bien sûr, que c'est touchant. Je prends le misérable morceau de papier pour lire ces mots. 

    « Tania, comme tu t'en doute peut être, je suis parti travailler. Fais comme chez toi. Je serai de retour ce midi. Mais fais attention. Je sais que le meurtrier a, pour le moment, attaqué la nuit, mais on n'est jamais trop prudent. A ce midi, Noah. » 

    Je repose la feuille à l'endroit où je l'ai trouvée sans plus y prêter attention. Je commence à me dire que Noah est un policier à la gomme. Il croit sérieusement que l'assassin qu'il recherche va venir gentiment devant la porte de sa maison pour me tuer et repartir comme si rien ne s'était passé ? Ce n'est pas moi qui croit au Père Noël, mais lui. Cela se voit qu'il ne le connaît pas, lui. Mais moi, je sais qu'il n'est pas ici pour le fun, en tant que simple touriste en vacances qui tue des gens pour le plaisir comme quelqu'un qui va à la plage pour bronzer. Oui, je sais. Quand on y pense, c'est assez comique comme image, mais ce n'est pas la réalité. Je soupire et j'ouvre la porte du frigidaire pour voir ce qu'il y a dedans. Je jette un rapide coup d'œil, car une sonnerie, indiquant que quelqu'un est devant la porte d'entré de la maison et qu'il attend patiemment qu'on vienne lui ouvrir, vient de retentir. Je ferme le frigo et je m'avance vers l'entrée. Et puis, j'hésite. Je ne vis pas ici et je ne sais pas si je peux ouvrir à une personne qui me sera certainement inconnue. Finalement, j'hausse les épaules et je me décide d'ouvrir à monsieur ou madame inconnue. Après tout, mon hôte ne m'a-t-il pas dit de faire comme chez moi ? Mais, oh surprise ! Quand j'ouvre qu'est-ce que je vois ? Rien. Le mot est juste. Rien. Personne. Ai-je rêvé ? Non ! Je veux bien admettre que je suis à moitié dépressive –voir dépressive tout court- mais je ne suis pas folle non plus. Deux hypothèses me viennent à l'esprit. Soit c'est un gamin idiot qui n'a rien d'autre à faire que des plaisanteries soit ... Mon regard descend vers mes pieds et je trouve une enveloppe avec mon nom écrit dessus posé par terre. Hem... Quelque chose me dit que cela va me mettre un sacré coup au moral mais tant pis. Je prends l'enveloppe et je rentre à l'intérieur. Je m'installe dans le salon et j'ouvre. Aucune lettre, juste trois photos. Et en les regardant, je ne peux m'empêcher de laisser échapper un cri de terreur tout en laissant tomber par terre ces trois misérables photographies trafiquées. En un simple coup d'œil, je viens d'apprendre plein de choses. Je sais qui est le destinataire. Et je sais aussi qu'il a un sacré coup de crayon. Vachement utile comme information je sais. 
    Mais je sais aussi, que si je ne veux pas avoir un gentil chien-chien du nom de Noah qui me suit partout, il vaut mieux que je cache ce que je viens de recevoir.

    Parce que, sur ces photographies, il y a moi, avec de jolies traces rouge sang autour de mon cou, indiquant très clairement les intentions du tueur à mon égard.


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  • Je suis dans ma voiture et un rapide coup d'œil à l'heure m'indique qu'il est actuellement 12h35. Je ne devrais plus tarder à arriver chez moi. J'espère qu'il ne s'est rien passé du côté de Tania. Enfin, je verrai, bien que je doute qu'elle me dise quoique ce soit s'il lui était arrivé quelque chose durant la matinée. 
    N'empêche, quand j'ai vu qu'il était l'heure de la pause déjeuner, je n'ai pu cacher mon soulagement. Comme je l'ai prévu, Jeffrey, un collègue et ami, n'a cessé de se moquer, de lancer des plaisanteries diverses et variées quand je lui ai dit que j'héberge actuellement Tania, notre future victime qui sait plus de chose qu'il n'y paraît. Sauf que sa comédie a duré toute la matinée, m'empêchant ainsi de me concentrer sur l'enquête en cours. Jeffrey est bien gentil et toujours disponible en cas de pépin, mais quand il le veut, il peut se montrer lourd, très lourd. Décidément, la paternité n'a eu aucun effet sur lui, et c'est bien dommage. Et rien que l'idée de devoir supporter le même cirque cette après-midi ne me réjouit guère, mais il va bien falloir que je fasse avec. Je dois impérativement résoudre mon enquête. Déjà parce que je sais que les habitants de cette ville commence à ne plus se sentir en sécurité. Et je les comprends parfaitement. Aussi, peut être qu'en la résolvant, le mystère qui entoure une certaine jeune femme brune aux yeux bleus disparaîtra. Et ainsi, je saurai tout de son passé et je pourrai ainsi l'aider. Mais je doute que ce soit pour toute suite. Elle ne me dira rien, préférant sans doute préserver son secret. D'ailleurs, pourquoi veut-elle ne rien dire ? Ne veut-elle pas être aidée, pour ensuite aller mieux ? Et dans ce cas, pourquoi ? Cette femme fait décidément bien travailler mon esprit. Je me pose tellement de questions sur elle ! Comment faire pour qu'elle se confie à moi ? Elle n'a pas un caractère facile, sans doute pour éviter que je perce sa carapace qu'elle a durement forgé pour se protéger. Pourtant, je ne lui veux aucun mal. Je veux juste la comprendre, savoir pourquoi tant de tristesse et de désespoir se lisent dans son regard océan. Et je veux pouvoir l'aider, pour que ces sentiments disparaissent, ou du moins, soit atténués. Car personne ne mérite de souffrir autant. Personne. Je soupire en me garant devant chez moi. Je sors de ma voiture et je m'avance vers l'entrée de ma maison. J'entre et je signale ma présence à Tania que je ne vois pas. Elle n'est pas sortie, je viens de l'entendre m'adresser un « ouais ». Au son de sa voix, je pense qu'elle est à l'étage, dans la chambre d'ami. Je ne sais pas ce qu'elle est entrain de faire, de ce qu'elle a fait de sa matinée et je ne veux pas le savoir. De toute façon, je doute qu'elle me réponde. Je pose mon manteau sur le porte-manteau, et je me dirige vers la cuisine, pour préparer le déjeuner. J'ouvre le frigo, je cherche quelques ingrédients et je commence ma préparation. C'est un plat tout simple, steak et haricots verts. Je ne suis pas très doué en cuisine, alors j'évite tout ce qui est trop compliqué à mon goût. Une fois que c'est prêt, j'appelle Tania et je m'installe à table et je l'attends. Je l'entends descendre les marches de l'escalier, tout en soupirant. Elle arrive dans la pièce d'un pas lent et elle s'assoit et elle commence à manger après avoir grommeler un « bon appétit ». Je fronce les sourcils tout en commençant à manger à mon tour. 

    -Quelque chose vous tracasse ? Demandai-je, intrigué par son comportement. 
    -Non. Me répond-t-elle d'un ton sec voulant dire qu'il vaut mieux que je ne poursuive pas la conversation. 

    Visiblement, elle n'est pas de bonne humeur. Pas du tout même. Je préfère ne pas insister et le reste du déjeuner se passe dans le silence. Une fois le repas terminé, Tania retourne à l'étage, dans la chambre d'ami. Je soupire de lassitude. Après avoir mis les assiettes dans le lave-vaisselle, je sors de chez moi, tout en annonçant à la femme que j'héberge que je retourne travailler. Elle ne répond pas. J'hausse les épaules et referme la porte derrière moi. Je monte dans ma voiture et je retourne sur mon lieu de travail, appréhendant déjà les futures plaisanteries de mon cher collègue. Une fois arrivé, je me dirige directement vers mon bureau. Pas de chance, sur le chemin, je croise Jeffrey, qui me regarde avec son fameux air moqueur. Je lève les yeux au ciel et je m'installe. J'ouvre le dossier concernant l'enquête et je ne prête aucune attention à mon meilleur ami. Celui-ci ne tardera pas à me faire la conversation. 

    -Alors, bien mangé, avec Tania ? Me demande-t-il, tout en insistant bien sur les deux derniers mots, le ton accompagné par son sourire éternellement moqueur. 
    -Dans un silence de mort, oui. Répondis-je, sans lever mon regard du dossier. 
    -Que tu dois être triste ! 
    -Pas spécialement non. On s'habitue à son caractère. 
    -La bonne excuse ! 
    -Il y a des fois où je me demande si tu es vraiment père de famille, lui dis-je, un sourire fier apparaissant sur mon visage. 
    -Tu les as vu mes gosses. Me répond-t-il. Alors oui, je suis bien père de deux enfants. 
    -Je sais. Mais tu dois bien voir ce que je veux dire. 
    -Je pense oui. 
    -Je l'héberge juste, lui dis-je, pour la énième fois de la journée. Et rien d'autre. Et j'ai la sensation qu'elle en sait plus que l'on pense sur notre assassin. 
    -Pourquoi tu ne l'interroges pas ? 
    -Elle ne dirait rien, affirmai-je, commençant à la connaître. Elle est bien trop mystérieuse et méfiante pour me dire quoique ce soit. Il faut que j'attende. Je n'ai pas le choix. 
    -J'aimerai bien la rencontrer. M'avoue Jeffrey. Rien que pour voir la tête de celle qui arrive à faire marcher tes neurones au point de les mettre en surchauffe. 
    -Tu essaies de faire l'humour ? 
    -Pas spécialement. 
    -Tant mieux. Parce que sinon, j'aurai dit que nous n'avions pas du tout le même sens de l'humour. 
    -Je m'en doute. 
    -Agent Vitmann ! Agent Teller ! S'écrie soudain un autre collègue, que j'identifie être Tom, qui est là depuis 3 mois environ. 
    -Qu'est-ce qui se passe ? Demandai-je, intrigué. 
    -Il y a une jeune fille qui désire vous voir. Nous annonce-t-il. C'est à propos de l'enquête. 
    -Elle est où ? 
    -A l'entrée. Elle vous attend. 
    -J'y vais. Tu viens avec moi Jeff ? 
    -Evidemment. 

    Nous nous dirigeons immédiatement vers le lieu que Tom nous avait désigné. Une adolescente d'environ 16 ans est là, apparemment un peu perdue à cause du monde qu'il y a dans la pièce. Elle n'est pas bien grande, environ 1m60. Elle a des cheveux châtains et raides et des yeux verts. Je me dirige vers elle, suivit de près par mon meilleur ami. 

    -Je suis l'agent Noah Vitmann. Me présentai-je. Et voici l'agent Jeffrey Teller, en désignant mon collègue. 
    -Je ... Je m'appelle Tessa Sherman. Nous répond-t-elle d'un ton hésitant, ses bras tenant fermement son sac contre elle. Je... je suis la fille de la première victime. Je... je pense que j'ai des informations pour vous.


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  • Je retiens mon souffle. Nous allons enfin avoir des informations supplémentaires. Nous l'invitons vers un endroit calme, pour pouvoir discuter tranquillement. Elle a l'air déstabilisé, certainement peu habituée à venir ici. Elle est assise sur une chaise et je m'installe en face d'elle, contrairement à mon collègue qui préfère rester debout. 

    -Alors, quelles sont tes informations ? Demandai-je calmement.
    -Je... je ne sais pas si cela pourra vous aider... Je ne suis pas très, très sûre. Dit-elle en baissant la tête. 
    -Tout ce que tu nous diras pourra nous aider. Affirmai-je 
    -Je... J'ai retrouvé des lettres... non, plutôt des photos... Elles étaient bien cachées. Nous informe-t-elle en commençant à fouiller dans son sac pour en extraire quelques photographies que je m'empresse de prendre dans mes mains pour les regarder. Dessus, il y a la première victime, et des traits rouge sang étaient dessinées autour de son cou. Je... je me souviens que pendant la journée avant qu'elle ne ... enfin voilà ... elle avait l'air perturbé. Continue-t-elle. Je ... pense qu'elle a dû les recevoir dans la journée. Surtout que ça n'arrêtait pas de sonner. Mais il n'y avait personne quand nous ouvrions la porte. 
    -Elle a donc reçu des menaces avant la nuit de sa mort. Dis-je à moi-même. Jeffrey, essaie de savoir si la deuxième victime a, elle aussi, reçu ce genre de photo. 
    -J'y cours. Me répond-t-il en s'éloignant pour aller à son bureau pour ensuite prendre possession de son téléphone. 
    -Est-ce que tu sais autre chose ? Je ne sais pas... N'aurais-tu pas vu quelqu'un qui te paraissait étrange durant cette journée ? Questionnai-je. 
    -Bah... Il y avait un homme, que j'ai vu de l'autre côté de la rue à chaque fois que ma mère ouvrait une enveloppe. Et aussi, il était là le lendemain, quand quelqu'un est venu pour nous dire que ma mère avait été tuée dans la nuit. Il avait l'air... bizarre. Surtout quand il souriait. On aurait dit qu'il était... satisfait. 
    -Est-ce que tu te souviens à quoi ressemblait cet homme ? 
    -A peu près oui. Il était blond, avec un mèche qui lui cachait les yeux. Il avait la peau légèrement métissée. Il devait faire environ 1m90 voir 1m95. Je ne sais pas trop... Et je crois qu'il avait une cicatrice sur une joue, ou plusieurs. Il était loin tout de même. Et je crois qu'il devait avoir à peu près ...la cinquantaine. 
    -Merci Tessa. 
    -J'espère que j'aurais pu vous aider. 
    -Tes informations nous aident beaucoup. Grâce à toi, nous avons une description d'un suspect. Ton père sait que tu es venue ici ? 
    -Non. Il est bien trop occupé pour savoir quoique ce soit de toute façon. 
    -Par contre, je dois garder ces photos. De toute façon, je doute que vous vouliez les garder, toi et ton père. 
    -Vous avez raison. Aussi, elle avait aussi reçu quelques lettres. Ajoute-t-elle me tenant une pochette contenant quelques lettres. 
    -Merci. Tu peux rentrer chez toi. Nous avons déjà tes coordonnées, si nous avons besoin de toi, nous t'appellerons. 
    -O..Ok. Au revoir. 
    -Au revoir. 

    Elle part pendant que je commence à lire ces lettres qui montrent bien les intentions de cet assassin. De plus, il raconte dans les détails ce qu'il a l'intention de lui faire subir. Cela m'étonne qu'elle n'ai pas immédiatement prévenu la police. Peut être qu'elle avait trop peur pour ça, ou peut être qu'elle pensait que c'était une blague de quelqu'un. Très mauvaise blague dans ce cas. Je me mets à réfléchir tout en m'enfonçant dans mon siège, les yeux rivés sur les lettres. 
    Mon meilleur ami ne tarde pas à me rejoindre. Je le regarde, espérant qu'il approche avec lui des informations. 

    -Alors ? Demandai-je. 
    -Alors, effectivement, d'après sa colocataire, elle aurait bien reçu des photos et des lettres de menaces aussi. Elle nous apporte ça tout de suite. 
    -Bien. Tessa m'a aussi fait une petite description d'un homme d'une cinquantaine d'années qu'il lui paraissait bizarre. 
    -Un peu vieux pour commettre ce genre de meurtres. Remarque-t-il. 
    -Il n'y a pas d'âge. Il doit être fort physiquement et cela doit lui suffire. 
    -Tu devrais faire attention pour Tania. Me dit avec sérieux Jeffrey. Si elle commence à recevoir ce genre de truc, c'est mauvais signe pour elle. 
    -Oui. Confirmai-je. Mais la connaissant, je doute qu'elle me dise quoique ce soit. Il va falloir que je me montre vigilant. Je vais retourner chez moi, pour surveiller les alentours. 
    -Oui. Au fait, tu n'es pas très curieux mon gros. Ajoute-t-il pendant que je me lève et que je remet mon manteau. Pendant que tu finissais ta conversation avec cette adolescente, j'ai fait une petite recherche sur Tania. Ce qu'on y trouve est très... intéressant. 
    -Je n'ai pas le temps de regarder. Lui répondai-je. Envoie moi le site par mail, j'irai voir plus tard. 
    -Pas de problème. A plus tard peut être. 
    -A plus tard. 

    Et je me dépêche de sortir et de monter dans ma voiture. J'essaie d'arriver le plus vite possible chez moi, respectant tout de même les limitations de vitesses. En un peu plus de cinq minutes, je me gare devant ma maison et j'entre rapidement dedans. J'appelle le nom de Tania mais pas de réponse. Je vais dans la chambre d'ami et je découvre, éparpillées sur le lit, une dizaines de photographies et deux lettres. Je n'ose pas jeter de coup d'œil aux lettres, par contre, certaines images m'intriguent. Non seulement il y a des photos où je peux voir Tania dessus avec des traits rouges autour de son cou, mais aussi des images de deux corps, gisant dans leur sang. Je reconnais facilement la femme et l'homme que j'ai vu sur deux photos appartenant à Tania. Ses parents seraient-ils donc assassinés tous les deux ? Soudain, on sonne à la porte. Je me dépêche de descendre les escaliers, manquant de tomber plusieurs fois et j'ouvre brusquement la porte d'entrée. Personne. Mon regard se baisse et je vois une enveloppe à mes pieds, avec le nom de Tania écrit dessus. Je la prends, je referme la porte. J'ouvre l'enveloppe et je vois des photos, de plusieurs personnes baignant dans leur sang et un message est joint à ces images. 

    « Tu te souviens Tania Garyl ? Bien sûr que tu te souviens. Comment tu pourrais oublier comment tu es seule maintenant ? Mais ne t'inquiète pas, bientôt, tu les rejoindras. 
    Signé : Ton pire cauchemar. » 

    Je me pose de plus en plus de questions. Qui sont tous ces gens ? Qui étaient-ils pour Tania ? Et pourquoi ce tueur s'acharne-t-il sur elle ? Il faut absolument que je la retrouve, et que je sache exactement ce qu'il lui est arrivé. Je me précipite à l'extérieur, prenant bien soin de fermer la porte derrière moi, et je me mets à courir dans les rues, cherchant désespérément la jeune femme. Je ne sais pas dans quel état je vais la trouver, mais, il n'est plus question d'être patient ou non. Les deux précédentes victimes sont mortes le soir même après qu'elle ait reçu les menaces de mort. Il est donc fort probable que l'assassin s'attaque à elle durant la nuit. Ce qui n'est guère réjouissant. Il faut absolument que j'empêche ce futur meurtre. Il ne faut pas qu'elle meure sans avoir vu qu'il y a toujours ne serait-ce qu'une lueur d'espoir dans la vie et qu'elle peut s'en sortir. Il faut qu'elle s'en rendre compte, il le faut. 
    Je cours, je cours. Sans m'arrêter. Je la cherche, partout. Sans la trouver. Je commence à prendre peur. Mais où est-elle ? Je finis par sortir de la ville. J'arrive sur une colline. Au loin, j'aperçois une silhouette qui me paraît familière. Je soupire de soulagement, bien que je suis essoufflé. J'avance vers elle. Rapidement, je sais que c'est bien Tania qui se trouve là, que je l'ai enfin retrouvée. 
    -Tania. Je dis dans un souffle une fois que je suis arrivé à sa hauteur. 

    Elle sursaute. Et elle se lève précipitamment tout en essuyant ses joues et ses yeux. Elle pleurait, je n'ai aucun doute là-dessus. Une fois en face de moi, elle me jette un regard noir. 

    -Que faites-vous ici ? Me demande-t-elle sur un ton froid. 
    -Je vous cherchais. 
    -Pourquoi ? 
    -Une adolescente nous a appris beaucoup de chose. Et je me suis précipité chez moi pour m'assurer que vous n'aviez rien. Et en entrant dans la chambre, j'ai découvert que vous avez reçu des menaces. Les photos m'ont beaucoup intrigué. Tania, que vous est-il arrivé ? 
    -En quoi ça vous regarde ! 
    -J'ai vu ces photos Tania, je les ai vu. J'ai vu vos parents baignant dans leur sang. Et plein de personnes qui étaient dans le même état ! C'était des proches à vous n'est-ce pas ? Que s'est-il passé ? Que vous est-il arrivé ? Pourquoi cet assassin s'acharne sur vous ? 
    -Ce ne sont pas vos affaires ! 
    -Tania, toutes les victimes sont mortes le soir même où elles ont reçu les menaces. Cela indique donc que ce soir, vous allez être en danger. Mais je dois savoir. Je dois savoir ce qui vous est arrivé. Je veux juste vous aider Tania. Et vous sauver des griffes de ce meurtrier.
    -Je n'ai pas besoin d'aide ! 
    -Vous mentez Tania, vous mentez. 
    -Je ne veux pas d'aide ! Surtout votre aide ! Personne ne peut m'aider ! Personne ! Vous comprenez ? Personne !! 
    -Ne dites pas ça. Je suis certain que je pourrais vous aider. Seulement, il faut me dire ce qui vous est arrivé. 
    -Je refuse ! 
    -S'il vous plait. 
    -Non ! 
    -Pourquoi ? Vous voulez souffrir éternellement ? Ne jamais voir la lueur d'espoir qui est à l'autre bout du tunnel ? La main que je vous tends pour vous aider à vous en sortir ? Pourquoi Tania, pourquoi ? 
    -Vous voulez savoir pourquoi ? Vous voulez vraiment savoir pourquoi ? Hurle-t-elle, agacée et aussi désespérée. Le jour de mes 6 ans, ma mère est morte, égorgée devant mes yeux ! En pleine nuit, j'avais soif et je me suis donc levée ! J'ai entendu du bruit et là, j'ai vu ce sale type tué ma mère ! J'ai hurlé comme une dingue ! Ca a réveillé mon père qui a poursuivit l'assassin ! Moi, j'avais les yeux rivés sur le corps de ma mère gisant dans son sang ! Quel beau cadeau d'anniversaire n'est-ce pas ? Quoi de plus traumatisant pour une gamine de 6 ans ! Dix ans plus tard, le jour de mes 16 ans, je revenais des cours et en entrant dans le salon j'ai vu mon père tombé au sol, égorgé, et le meurtrier le regardait, un sourire satisfait sur les lèvres ! J'ai crié, hurlé ! Il s'est approché de moi, m'a plaqué contre le mur tout en me tenant fermement par le cou ! Il m'a dit qu'il ne laissait jamais de témoin ! Jamais ! Sur le coup, j'ai bien cru qu'il allait me tuer ! Mais j'ai eu un bon réflexe, qu'il l'a bien senti passé ! Je suis ensuite partie en courant pour me réfugier chez l'un de mes amis ! Dix autres années ce sont passé depuis ce jour ! J'avais un travail, des amis, le peu de famille que j'avais était unie, un fiancé ! J'avais tout pour être heureuse ! Tout ! Sauf qu'au fil des jours, ils sont morts. Pas tous en même temps ! Quelques uns par semaine ! Et il prenait un malin plaisir d'envoyer des photos ! Ils les a tous tués tous ! Mon fiancé qui a été longtemps mon meilleur ami ! Ma meilleure amie toujours là quand il le fallait est morte ensuite ! Puis ma tante ! Ma cousine ! Son fils ! Et le dernier de mes proches qui est mort, mon frère jumeau ! Le seul qui pouvait vraiment me comprendre ! Ce satané assassin m'a tout pris ! Tout ! Absolument tout ! Je n'ai plus rien ! Strictement rien ! Vous vous souvenez quand vous m'aviez demandée pourquoi je n'étais pas auprès de mes proches et qu'ils devaient s'inquiéter pour moi ? Et bah vous l'avez votre réponse ! Parce qu'ils sont morts ! Ils sont tous morts ! Tous ! A partir de ce jour, j'ai tout vendu ! Tout ce que je possédais ! J'ai quitté mon travail et je suis partie ! Je savais qu'il me poursuivais ! Je savais qu'il voulait me tuer parce que je suis un témoin gênant pour lui ! Et d'ailleurs je peux le dire au présent ! Je sais qu'il me poursuit. Je sais qu'il veut me tuer parce que je suis un témoin gênant pour lui ! Je suis seule maintenant ! Je n'ai plus personne sur qui compter ! Et maintenant, je me dis à quoi bon s'il me tue ! Il va me rendre un sacré service ! Vu que je ne suis pas capable de mettre fin à mes jours moi-même ! Je suis seule ! Seule ! Seule ! SEULE ! 

    Sa voix s'était brisée à la fin de son long monologue. Et pendant son discours, les larmes ont commencé –ou plutôt recommencé- à couler sur ses joues. 
    Elle tombe à genoux sur le sol et elle laisse libre court à son chagrin, à son désespoir. Mon cœur se fend en deux, tellement qu'une telle tristesse me touche. Je ne m'attendais pas à ce qui lui était arrivé soit aussi terrible. Je me mis à mon tour à genoux sur le sol et je la prends dans mes bras. Elle semble surprise, mais néanmoins réticente. Mais je ne m'éloigne pas. Mes bras l'entoure toujours. 

    -Tu n'es plus seule Tania, lui murmurai-je calmement, en me mettant à la tutoyer. Parce que je suis là pour t'aider. Pour t'aider à remonter la pente et à sourire à nouveau à la vie. Pour t'aider à toujours garder espoir. Je ne te laisserai pas t'enfoncer encore plus dans le gouffre. Tu mérites d'être heureuse Tania, tu le mérites. Et de là où ils sont, je sais que tous ceux qui ont été contraints de te laisser n'auraient jamais voulu te voir dans cet état. Il voudrait que tu arrives à te relever et à être heureuse à nouveau. Ce sera dur certes, je l'admets. Mais je serai là pour t'aider. Tu peux compter sur moi Tania, tu pourras toujours compter sur moi. 
    -Arezki. Me souffle-t-elle soudain, entre deux sanglots, sa tête posée contre mon torse. 
    -Pardon ? 
    -Arezki. Le meurtrier. Il s'appelle Arezki. 
    -Arezki... Répètai-je songeur. Connais-tu son nom de famille ?
    -Non. Juste son prénom. Me répond-t-elle en se calmant même si les larmes continuent de couler sur ses joues. Et je sais aussi à quoi il ressemble, bien sûr. 
    -Oui. Mais quelque chose m'intrigue... Tu n'as jamais dit à personne tout ce que tu savais sur l'assassin de tes proches au moment des enquêtes ? 
    -Bien sûr que si ! Me crie-t-elle. Mais ils ont dit que j'étais encore sous le choc et que je disais n'importe quoi ! Tout ça à cause du prénom ! 
    -Quelle bande d'incapables ! Je sais que le prénom Arezki est rare, très rare même, mais quand même ! Ce n'est pas une raison ! Mais ne t'inquiète pas Tania, repris-je d'une voix plus calme, moi je te crois et je ferai tout mon possible pour qu'il ait ce qu'il mérite. 
    -M...Merci. 

    Nous restons assis sur le sol, Tania pleurant dans mes bras, pendant encore un moment. Je ne sais pas combien de temps, mais je ne montre aucun signe d'impatience. Le temps passe, et plus aucune larme n'inonde son visage. Je me relève et je l'aide à en faire de même. Nous montons ensuite dans sa voiture et je l'amène sur mon lieu de travail. En voyant le bâtiment au loin, elle me regarde. Elle paraît intriguée. 

    -C'est là où tu travailles non ? 
    -Oui. 
    -Pourquoi tu m'emmènes là-bas ? 
    -Parce que je dois prendre ta déposition. Mais ne t'inquiète pas, nous n'y resterons pas longtemps. J'ai conscience que tu as besoin de calme. 

    Elle ne me répond rien. Un silence règne dans la voiture. Je n'ose pas le briser, de toute façon, je n'ai rien à dire pour le moment. Mais quelque chose devrait, peut-être, me surprendre, bien que ce ne soit pas le cas. Elle n'a pas riposté quand elle a su où je me dirigeais. Peut-être parce qu'elle est fatiguée de se battre tout le temps, qu'elle n'en a plus la force. Peut-être veut-elle laisser couler les choses et attendre de voir ce que va lui réserver la suite. Peut-être. Je ne peux que supposer, je ne suis pas dans sa tête. 
    Je me gare devant le bâtiment et j'aide Tania à sortir du véhicule. Je l'entraîne à l'intérieur et je lui propose de s'installer sur un siège en face de mon bureau, chose qu'elle fait sans protester, sans rien dire. Jeffrey est au téléphone mais je peux lire dans ses yeux qu'il est entrain de se demander si la jeune femme est bien Tania, la prochaine victime. J'acquiesce d'un signe de tête et il se re-concentre sur sa conversation. Je me mets à écrire tout ce que m'a raconté Tania dans le dossier et sur l'ordinateur. Puis mon attention se tourne à nouveau vers elle pour lui demander : 

    -Peux-tu me faire une description la plus précise possible de ce Arezki ? 
    -Il est grand, 1m90 environ. Il est blond avec des yeux marrons. Il a un visage allongé et au dernière nouvelle il a un pierçing sur la lèvre inférieur. Oui, je sais, c'est étonnant pour son âge. Il a un tatouage au niveau de l'épaule gauche. Il a aussi une cicatrice sur la joue droite et une autre sur son nez, plus petite que l'autre. Il a la peau métissée. Il doit avoir la cinquantaine aujourd'hui, je crois. Je... Je ne sais pas quoi dire d'autre. Dans ma tête son image est clair. Mais tout ressortir avec des mots ... 
    -Ce n'est pas grave. Affirmai-je. C'est déjà très bien. Beaucoup plus précise que la première description. 
    -Tant ... mieux. 

    Je recopie la description de Tania dans le dossier. Je ne sais pas quoi ajouter. Quand je jette un coup d'œil vers elle, cette dernière semble perdue dans ses pensées. Je n'ose pas lui parler, ce qui provoquerait son retour à la réalité. Je préfère qu'elle reste encore un peu dans son monde avant de devoir revenir à la dure réalité. 

    -Noah, c'est donc elle Tania je présume ? Me demande soudain Jeffrey, un large sourire aux lèvres. 

    Je sursaute, surpris qu'il est déjà terminé sa conversation téléphonique et Tania a la même réaction que moi. Je soupire à cette constatation et je jette un regard noir en direction de mon collègue. Il hausse un sourcil, intrigué. 

    -Quoi ? Pourquoi tu me regardes comme ça ? J'ai dis quelque chose qu'il ne fallait pas ? Me lance-t-il ne comprenant visiblement pas. 

    Je me lève et entraîne mon meilleur ami plus loin, après avoir promis à Tania que je n'en avais pas pour longtemps. Une fois isolé dans les toilettes pour homme, Jeffrey ne manque pas de vouloir faire de l'humour, bien que ce ne soit pas vraiment le moment. 

    -Parler dans les toilettes qui puent... Charmant... Tu n'aurais pas pire ? C'est ton truc en ce moment les toilettes. 
    -Ce n'est pas vraiment le moment de débattre sur l'odeur tu sais, répliquai-je, sachant bien de quoi il veut parler. Et si tu parles de la semaine dernière, sache que les toilettes sont les seuls endroits où on peut parler tranquille sans être écouté. 
    -Je veux bien te croire. Sinon, pourquoi m'as-tu jeté un regard noir ? Je n'ai rien dit de mal pourtant ! 
    -Pour répondre à ta question de tout à l'heure oui c'est bien Tania. Mais au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, elle ne va pas bien du tout et elle était perdue dans ses pensées, donc dans son monde. Et toi, tu l'as ramenée à la réalité ! 
    -Ouais... Et ? 
    -Et dans son cas, quitter la réalité ne serait-ce quelques minutes ne lui fait pas de mal. Bien au contraire ! 
    -C'est juste pour ça ! C'est pas bien grave ! S'exclame-t-il en haussant les épaules. 

    Je soupire en levant les yeux au ciel. Mon collègue n'est pas croyable ! C'est à se demander s'il est vraiment père de deux enfants. J'espère pour eux d'ailleurs qu'ils hériteront du caractère de leur mère. Je croise les bras et respire un grand coup pour garder mon calme. Ca ne servirait à rien que je m'énerve et puis, j'ai promis à Tania que je ne mettrai pas longtemps à revenir. 

    -Laisse tomber, tu ne comprends rien. Je soupire en sortant des toilettes. 

    J'ai beau me dépêcher, il me rattrape rapidement. Je soupire mais j'accepte tout de même de l'écouter, juste pour bien lui montrer que je suis bien plus mature que lui, que dans ma tête, j'ai bien 30ans. 

    -Quoi ? 
    -Excuses moi. Me dit-il. Ne t'inquiète pas, j'ai compris ton regard noir de tout à l'heure. 
    -Alors pourquoi ces réflexions ? 
    -Pour te détendre ! T'es complètement sur les nerfs depuis le début de l'enquête ! Surtout depuis que tu as rencontré Tania d'ailleurs. 

    J'hausse un sourcil, intrigué par ses propos. Qu'est-ce qu'il entend quand il dit que je suis sur les nerfs depuis le début de l'enquête et plus particulièrement depuis que j'ai rencontré Tania ? Je me posais beaucoup de questions sur cette femme et sur le mystère qui l'entourait. Peut être qu'il me trouvait « sur les nerfs » parce qu'à chaque fois qu'il me parlait, il me dérangeait dans mes réflexions ? Peut être. A vrai dire, je n'en ai aucune idée. Je lui fais part de mon hypothèse auquel il répond par un « sans doute ». Je le laisse et je me dépêche de rejoindre Tania que j'ai laissé seule à mon bureau. J'arrive vers elle, et cette dernière à l'air perdue dans ses pensées. Je la sors doucement de son monde, à regret, pour lui dire que je la ramène chez moi. Elle ne me répond rien et se lève. Nous montons dans la voiture et je conduis jusqu'à ma maison. Un silence total règne dans la voiture. Je suis concentré sur la route et Tania regarde le paysage par la fenêtre, pensive. 

    -Tu ne pourras rien faire. Murmure-t-elle à un moment. 
    -Pardon ? M'exclamai-je. 
    -Tu ne pourras rien faire. Il m'aura. Il a toujours sa cible. 
    -Ne dis pas ça, je te protégerai et il ne mettra pas la main sur toi.
    -Tu veux, mais tu n'y arriveras pas. Il est malin. Il a toujours ce qu'il veut. Continue-t-elle à murmurer. 

    Je jette un coup d'œil vers elle, inquiet. Pense-t-elle donc à ça depuis un moment ? Pense-t-elle que sa fin est proche ? Qu'il aura sa peau ? Non ! Elle se trompe. Parce que j'empêcherai ce Arezki de lui faire du mal !

     Je m'en fais le serment.

     


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