• Chapitre 6 - Noah

    La nuit ne va pas tarder à tomber. Quant à moi, j'avance dans les rues d'un pas déterminé. Je sais où je vais, et je sais ce que je veux faire. Je me rends chez Tania... Du moins, dans le motel où elle réside. Je veux des réponses. Elle est si... si mystérieuse. Elle cache tellement de choses que s'en est presque effrayant. Pourtant, l'image de son visage quand je lui ai dit le message qu'avait laissé le meurtrier ne cesse de me revenir en mémoire. Elle avait l'air surprise, au début. Puis la surprise a laissé place à la frayeur. Oui, c'est ça. Elle était tétanisée. Qui ne le serait pas en apprenant que quelqu'un veut sa peau ? Sauf que, j'ai bien l'impression qu'elle connaît ce type, et qu'elle en a peur. Peut être est-ce à cause de lui que j'arrive à lire dans son regard bleu océan une grande tristesse. Peut-être a-t-elle déjà eu affaire à lui dans le passé. Peut être qu'elle a été témoin de quelque chose. Ce qui expliquerait pourquoi il veut sa mort. Cela expliquerait bien des choses d'ailleurs. Je ne sais pas comment elle va réagir quand je vais arriver pour l'interroger. Mal je suppose, la connaissant. Mais je commence à penser que cette froideur qu'elle affiche volontairement n'est qu'une façon de se protéger. Une sorte de carapace qu'elle se serait forgée avec le temps pour éviter de montrer ce qu'elle ressent au fond d'elle-même. Mais, comme on le dit souvent, le regard ne trompe pas. Tout le chagrin qui est en elle se reflète dans ses yeux. Je l'ai remarqué dès que je l'ai rencontrée. A ce moment-là, j'ai su qu'elle ne pouvait être l'assassin, mais je devais faire mon travail. Je ne peux pas juger à partir d'une intuition. Je veux en savoir plus sur elle. Elle m'intrigue. Mais elle me fait de la peine aussi. J'aimerai tellement percer son secret, pour pouvoir enfin l'aider. Parce qu'elle a besoin d'aide, je le sais au plus profond de moi. Je sais que ce ne sera pas facile, mais je n'abandonnerai pas. Je me souviens aussi comment ses mains se sont crispées autour de la tasse quand je lui ai demandé pourquoi elle n'était pas auprès de ses proches, quand elle était chez moi. J'ai dû mettre le doigt sur un sujet sensible, involontairement bien sûr. Si je veux réussir à la mettre en confiance, il va falloir que j'agisse avec plus de tact, et surtout, avec beaucoup de patience.
    Au bout de quelques minutes de marche, j'arrive enfin au motel. Ce bâtiment n'est pas du tout en bon état. Je ne suis pas sûr que les services d'hygiène approuvent ce lieu. Je me demande bien comment des personnes peuvent séjourner ici, même pour une seule nuit. Je mets mon dégoût envers ce tas de béton de côté et j'entre. Je monte les étages pour arriver à celui où il y a la chambre de Tania. Une fois arrivé devant sa porte, je frappe et j'attends. Mais rien. Je frappe à nouveau, mais toujours rien. Je constate que ce n'est pas fermé à clé et je décide d'entrer. Je m'aperçois rapidement qu'elle n'est pas dans cette pièce. Je ferme soigneusement la porte. Je m'avance dans la pièce et soudain, quelque chose attire mon regard et mon attention. Je m'approche de la table où deux photographies sont posées dessus. Je prends la première dans une main et je l'observe. Elle avait été prise en hiver, sans aucun doute là dessus, à cause de toute cette neige. Un bonhomme de neige était derrière quatre personnes : deux adultes et deux enfants qui devaient avoir à peu près le même âge. La femme avait des cheveux blonds et de magnifiques yeux bleus. Son visage ne reflétait que bonheur et joie de vivre. Bizarrement, elle me rappelait quelqu'un par la forme de son visage et ses yeux. L'homme avait des cheveux bruns et des yeux marrons foncés. Lui aussi souriait et il tenait tendrement la main de celle qui était peut être sa femme. Et sans doute que les deux petits étaient leurs enfants. La fille avait des cheveux châtains et des yeux bleus, quoique un peu plus foncés par rapport à ceux de sa mère. Elle devait avoir à peu près 5 ans et son visage montrait toute l'innocence que l'on peut avoir à cet âge. Le garçon, qui ne devait pas être plus vieux que la fillette, avait la même couleur de cheveux que sa sœur, mais lui, avait les yeux marrons de son père. Ils avaient l'air de formé la parfaite petite famille. Ils avaient l'air parfaitement heureux et unis.
    Sans poser cette photo, je prends la deuxième. Changement de décor cette fois-ci. La scène a dû se passer au le printemps, à cause de l'arbre en fleur que je vois en arrière plan. Mais cette fois-ci, il n'y avait pas quatre personne, mais trois, un homme et deux adolescents qui devait avoir approximativement 15ans. L'homme ressemblait beaucoup à celui de la photo précédente, mais avec quelques années de plus et moins bien rasé. Il tenait chaleureusement les deux adolescents par les épaules. L'adolescente avait des yeux bleu océan et des cheveux bruns coupé à la garçonne. Elle me rappelle étrangement quelqu'un. Elle affichait un léger sourire. A coté d'elle, l'adolescent avait les même cheveux bruns qu'elle mais lui, avait les yeux marrons foncé. Je n'ai pas besoin de réfléchir davantage pour deviner qu'il s'agit de la même famille quelques années plus tard et sans la mère. Où est-elle d'ailleurs ? Etait-ce elle qui prenait la photo ? Ou était-elle divorcé avec le père ? Ou bien c'était quelque chose de plus grave...

    -Qu'est-ce que vous faites ici ? Et que faites-vous avec mes photos dans vos mains ? Vous fouillez dans mes affaires maintenant ? Me questionne soudain une voix féminine et familière, dont l'agacement s'entend parfaitement.

    Je sursaute et je me retourne, toujours avec les deux photographies dans les mains. Elle était là, en face de moi. Elle me regardait d'un air sévère. Ses bras sont croisés contre sa poitrine. Ses cheveux bruns sont attachés en queue de cheval. Elle porte un manteau à l'apparence plus chaude que la veste qu'elle portait hier. Et puis soudain, je comprends pourquoi le visage de l'adolescente mon rappelait quelqu'un. Cette jeune fille et la fillette n'était qu'autre que Tania. Avec elle, il y avait son frère, son père et sa mère pour la première photo. Immédiatement, des questions germent dans mon esprit. Question que je me presse de poser.

    -Ce sont des personnes de votre famille sur ces photos ? Demandai-je. Où sont-ils ? Pourquoi n'êtes-vous pas avec eux ? Est-ce que cela à un rapport avec le meurtrier que je cherche ?
    -Ce ne sont pas vos affaires ! Rendez-les moi !

    Sans attendre, je m'exécute. Mais je remarque qu'à côté d'elle, il y a des sacs de voyage remplis. Je fronce les sourcils et mon regard se pose à nouveau sur elle.

    -Pourquoi avez-vous fait vos valises ?
    -Je m'en vais ! Je suis restée suffisamment ici ! Me répond-t-elle, agacée.
    -Mais vous ne pouvez pas partir ! Répliquai-je.
    -Et pourquoi ça ?
    -Parce que fuir ne vous servira à rien.
    -Je ne fuis pas ! Nie-t-elle.
    -Vous fuiez le meurtrier c'est ça ? Commencai-je à comprendre.
    -Je ne fuis personne ! Ah si ! Peut être vous ! Vous et votre manie de vous mêlez de ce qui ne vous regarde pas !
    -Je cherche à vous aider.
    -Je n'ai pas besoin d'aide ! S'écrie-t-elle. Et même si j'en avais besoin, ce n'est pas à vous que j'irai m'adresser !
    -A qui alors ? A en voir votre mode de vie, vous bougez tout le temps pour fuir quelque chose ou plutôt quelqu'un je pense. Vous êtes enfermée dans votre solitude. Vous n'avez personne avec vous.

    Elle ne répond pas. Je pense qu'elle sait que j'ai raison. Son regard fuit le mien et à un moment, il se pose sur les photos. Un soupir s'échappe de ses lèvres. Je m'approche doucement d'elle. Je penche mon visage pour essayer de voir le sien, surtout l'expression qu'elle peut afficher. Je finis par rompre le silence pesant qui s'est installé.

    -Tania, restez, s'il vous plait. J'ignore ce qui vous est arrivée et le rapport entre vous et le meurtrier, mais il est sans doute temps d'affronter les futurs événements.
    -Sauf que je ne peux pas rester. Dit-elle sans lever le regard.
    -Pourquoi ?
    -Parce que je dois partir ce soir. Le gérant du motel veut que je m'en aille, pour pouvoir donner la chambre à quelqu'un d'autre. Il faut que je parte.
    -J'ai une chambre d'amie chez moi. Je peux très bien vous loger le temps que tout soit réglé. Et au moins, je serai sûr que vous n'avez rien.
    -Mais...
    -S'il vous plait acceptez. Insistai-je. Je veux vraiment vous aider. J'arrive à lire une très grande tristesse dans vos yeux et j'aimerai bien comprendre pourquoi elle est là.
    -Je veux bien. Soupire-t-elle. Mais ne croyez pas que je vous dirai quoique ce soit sur moi !
    -Je ne me fais pas d'illusion non plus.

    Je l'aide à finir d'emballer ses affaires puis, nous sortons de la chambre. Une fois à l'extérieur, nous rangeons les affaires de Tania dans le coffre de sa voiture et je monte du côté passager et elle du côté conducteur. Elle démarre le véhicule et nous nous éloignons du motel. Je lui indique par quelle rue passer pour arriver chez moi. Quelques minutes plus tard, nous arrivons devant ma maison et je l'aide à sortir ses affaires, puis à les monter dans la chambre d'amie. Elle ne dit rien. Son regard est vague. Je me demande bien à quoi elle peut bien penser. Je veux l'aider à s'installer, mais elle refuse mon aide, en disant qu'elle peut bien se débrouiller et que, en plus, elle veut rester seule un moment. Je n'insiste pas et je sors. Je descends au rez-de-chaussée et je me laisse tomber dans le canapé. Je mets ma tête entre mes mains, mes coudes prenant appui sur mes cuisses. Je sais qu'il va falloir que j'explique à mes collègues le pourquoi du comment pour le fait qu'une future victime se trouve chez moi, mais à vrai dire, ce n'est pas ça qui me pose spécialement problème mais un de mes collègues, Jeffrey, qui est aussi un ami de longue date. Nous nous sommes connus pendant nos études. Depuis, nous nous entraidons, nous partageons nos informations sur nos enquêtes en cours. Et il était là quand ma femme m'a quitté, parce que j'étais trop pris par mon travail. Et je pense connaître sa réaction quand il apprendra que j'héberge Tania. Il va falloir que je m'arme de patience pour lui expliquer que c'est seulement pour l'aider et éviter qu'elle se fasse tuer que je fais cela. Je le connais, il serait capable de s'imaginer n'importe quoi.
    Sinon, je me demande sans cesse ce qui a bien pu arriver à cette femme pour qu'elle soit aussi... tourmentée. Et encore, je pense que le mot est trop faible pour définir ce qu'elle peut bien ressentir. Je sais qu'elle ne se confiera pas facilement à moi, mais je serai patient. Je sais que dès qu'elle m'aura tout dit, j'arriverai à l'aider. Du moins je l'espère. Mais personne ne mérite d'être aussi malheureuse. Quelles embûches la vie a bien pu lui mettre sur sa route ? Pourquoi n'arrive-t-elle pas à les surmonter ? Est-ce si grave et si douloureux que ça en a l'air ? Quels secrets peut-elle bien cacher ?

    Mais je promets, que pour n'importe quel problème qu'elle a eu, je l'aiderai.

     


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